lundi 5 octobre 2009

Aspects positifs ? vraiment ?

Je me permets d'écrire un billet sur un sujet non économique mais qui est assez politique et qui m'a pas mal scandalisé. L'autre jour, en regardant les magazines dans un kiosque a journaux, je tombe par hasard sur « l'histoire » (ou « l'historien » je ne sais plus) qui consacre un dossier spécial à la colonisation. J'ai juste lu l'édito, et grosso modo ça disait à peu près : «  il y a eu des aspects positifs mais a un prix élevé : racisme, ségrégation etc ». Donc en gros, ils adhèrent à l'idée qu'on a fait une mission civilisatrice et que avoir construit des écoles etc, c'était bien. Disons-le tout de suite, ce n'est pas ma position et je trouve ça même assez scandaleux.


Effectivement, le fait de construire des hôpitaux, des écoles etc. font penser à des actes positifs. Mais les choses sont plus compliquées que ça . Il y a plusieurs raisons qui contredisent énormément cette idée :

La première c'est qu'il faut revenir à la base du don. « Oui les colons ont voulu donner des choses au population locale ». Soit. Mais le don est-il nécessairement une chose « positive » ? Eh bien là je dis non. Je me souviens avoir lu un psychologue du nom de Jacques Salomé qui disait : « donner sans s'imposer, sans mettre l'autre en situation de dette ». Et là, effectivement, on s'aperçoit que le « sans s'imposer » pose vraiment problème dans le cas des colonies. Oui les colons ont voulu donner, mais ils l'ont fait sans s'adapter à ce dont les populations locales avaient besoin. Parce que dans une relation, il y a deux personnes : un qui donne, l'autre qui reçoit. Et ce n'est pas nécessairement une chose facile. Les populations locales ont-elles "reçues" ce que l'on leur a imposé ? Je parle de "recevoir" au sens psychologique du terme bien sûr. Je pense que l'on peut difficilement dire un oui franc et massif.
La seconde c'est que même aujourd'hui les aides au développement sont extrêmement critiquées. On a fait beaucoup de progrès en science économique depuis 50 ans et même avec ça, on arrive pas à aider l'Afrique ou on a beaucoup de mal. Alors, avant les choses que l'on a voulu faire là bas était bien et sans problèmes ? Là on a droit à un remake de l'économie bisounours. Les étudiants en économie savent que de nombreuses politiques humanitaires ont eu de nombreux effets pervers et ont eu des conséquences ambiguës. Et je doute très sincèrement que ce qui s'est passé dans les colonies y fassent exception.
La dernière et enfin la plus importante, je vais l'aborder avec une citation de l'historien Gérard Noiriel : « La colonisation est un phénomène extrêmement compliqué où il peut y avoir des aspects positifs mais qui s’inscrivent dans une logique qui, elle, a été totalement condamnée par l’histoire ». Et oui la colonisation est globalement condamnée. Et donc on a le sentiment qu'avec ce genre de discours, certains essaient de faire en sorte que celle-ci ne le soit plus. Et ça, c'est extrêmement génant.


Enfin deux choses : un débat sur lemonde.fr avec Pascal Blanchard, historien. Je suis assez d'accord avec ce qu'il dit. Puis une citation d'Aimé Césaire :


"A mon tour de poser une équation : colonisation = chosification.

J'entends la tempête. On me parle de progrès, de "réalisations", de maladies guéries, de niveaux de vie élevés au-dessus d'eux-mêmes.

Moi, je parle de sociétés vidées d'elles-mêmes, des cultures piétinées, d'institutions minées, de terres confisquées, de religions assassinées, de magnificences artistiques anéanties, d'extraordinaires possibilités supprimées.

On me lance à la tête des faits, des statistiques, des kilométrages de routes, de canaux, de chemin de fer.

Moi, je parle de milliers d'hommes sacrifiés au Congo-Océan. Je parle de ceux qui, à l'heure où j'écris, sont en train de creuser à la main le port d'Abidjan. Je parle de millions d'hommes arrachés à leurs dieux, à leur terre, à leurs habitudes, à leur vie, à la danse, à la sagesse.

Je parle de millions d'hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d'infériorité, le tremblement, l'agenouillement, le désespoir, le larbinisme.
"

Dans ce passage, il est tout de même assez clair que les "progrès" apporté par les colonisateurs ne sont pas vécues comme quelque chose de "positif"

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